Lieu : Hôtel Béatrice à Kinshasa.
Honorable Président de la Commission Droits de l’Homme de l’Assemblée nationale ;
Excellence Monsieur le Ministre des Droits humains ;
Excellence Mme la Ministre du genre, famille et enfant ;
Monsieur le Directeur du Bureau Conjoint des Nations Unies aux droits de l’Homme ;
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Chef de missions diplomatiques accrédités en RDC ;
Cher.e.s collègues membres des organisations des droits humains ;
Mesdames et messieurs, à vos titres et qualités respectifs.
À l’occasion de la célébration de la journée internationale des droits de l’Homme, sous le thème « Dignité, liberté et justice pour tous », nous saluons les efforts du gouvernement congolais dans la mise en œuvre des recommandations issues du 3ᵉ cycle de l’Examen périodique Universel. Tel est le cas des consultations qui ont conduit à la rédaction du rapport intérimaire de suivi des recommandations acceptées par la RDC lors de son dernier examen en 2019.
Il en est de même de la publication, par le Gouvernent, du Livre blanc sur l’agression avérée et les différents crimes commis dans ce contexte par le M23/RDF, lequel recueille des preuves irréfutables qui permettront de réclamer et d’obtenir justice pour que plus jamais la barbarie ne se répète.
Nous déplorons le récent massacre faisant plus 131 civils tués à Kishishe au Nord Kivu, tel qu’indique le rapport préliminaire de la MONUSCO. C’est exactement dans ce cadre que la CENCO et la société civile ont organisé une marche pacifique en date du 02 décembre 2022 pour dénoncer le silence du monde face à la tragédie humaine qui sévit à l’Est de la RDC depuis plusieurs années.
En termes d’avancées, nous évoquons le vote, par l’Assemblée nationale, de la Loi portant principes fondamentaux relatifs à la réparation des crimes de violences sexuelles et autres crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, lequel attend son examen, au Sénat, pour permettre aux victimes d’accéder aux réparations à la fois individuelles et collectives.
Il y a lieu de noter l’évolution du processus de la Loi portant protection et responsabilité des défenseurs des droits humains en RDC dont, une fois adoptée, pourra placer la RDC sur la liste des autres pays africains qui en dispose, à savoir la Côte d’Ivoire, le Mali et le Burkinafaso.
Sous un autre angle, la répartition équitable de nouveaux magistrats recrutés, permettra de palier à la carence des effectifs dans plusieurs juridictions, plus particulièrement en milieu rural.
Notons également la mise en place d’une Stratégie sectorielle des droits humains en République Démocratique du Congo, laquelle attend son adoption par le Conseil des Ministres.
Malgré ces avancées considérables, il est noté une régression dans le respect des droits humains sur toute l’tendue du territoire national, laquelle se caractérise par des arrestations arbitraires, des détentions illégales, des cas de torture et autres traitements cruels, inhumains et dégradants.
Entre le 1er janvier au 10 décembre 2022, l’Organisation Partenariat pour la Protection Intégrée (PPI), a documenté 294 cas des violations et abus contre les défenseurs des droits, les journalistes et les médias en RDC. Ces violations sont plus constituées d’assassinat, menace, arrestation et détention arbitraire,
harcèlement judiciaire, intimidation, cambriolage des bureaux et des véhicules des DDH, journaliste et activistes pro démocratie ainsi que de coupure du signal de plusieurs médias.
A titre d’exemple, au Sud-Kivu, même des députés provinciaux sont empêché de tenir leur plénière et humilié en pleine journée. Tel est le cas du Vice-Président de l’Assemblée Provinciale, et Bâtonnier honoraire de l’Ordre des avocats de cette Province, qui a été agressé publiquement, pour avoir présidé une plénière sous une forte tention. Malheureusement, aucun procès n’a été organisé en flagrance pour juger les auteurs desdits faits ignobles bien identifiés.
Excellences Madame, Monsieur les ministres,
Nous rappelons que plusieurs parties du pays, notamment les provinces de l’Est, le Kasaï ainsi que le Mai – ndombe continuent de faire objet des violations graves du droit international public et du droit international humanitaire et dont la femme en paye un lourd tribut.
Nous demeurons convaincus que pour mettre fin à ce cycle de violence inouïe, il est un impératif que les auteurs matériels et intellectuels soient punis, que les victimes de cette tragédie humaine accèdent aux réparations individuelles et collectives, que le processus de vérité et réconciliation soit enclenché et que les véritables réformes des institutions judiciaires et sécuritaires s’en suivent. Tel est le combat quotidien du Dr. Denis MUKWEGE, Prix Nobel de la Paix 2018, qui demande, de manière incessante, la mise en oeuvre des recommandations issues du rapport du projet mapping des Nations Unies en RDC.
Il y a lieu de soulever également, le fait que les Défenseurs des droits de l’Homme, les dénonciateurs, les lanceurs d’alertes, les journalistes ainsi que les activistes pro démocratie, qui dénoncent au quotidien le Génocide des Congolais pour les Gains Économiques (GENOCOST), ne sont pas à l’abris des menaces, des arrestations arbitraires, des intimidations, de l’exil forcé, voire de l’assassinat.
Au regard de ce qui précède, nous notons que la restauration de la paix n’est possible en RDC qu’à travers la mise en place des mécanismes de Justice Transitionnelle et l’adoption de textes protégeant, de manière effective, les défenseurs des droits humains engagés, au quotidien, pour l’émergence d’un État de droit.
C’est pourquoi nous exhortons le Parlement congolais à parachever le processus du vote de loi portant protection des défenseurs des droits humains conforme aux standards internationaux.
En même temps, nous demandons au Gouvernement de déclencher les mécanismes de Justice transitionnelle pour l’établissement d’un tribunal pénal spécial ou des Chambres mixtes spécialisées pouvant juger les auteurs présumés des crimes graves commis en RDC et de donner accès aux victimes à des réparations collectives et individuelles. Cela freinera toute personne qui continuerait d’alimenter les groupes rebelles à l’échelle nationale au détriment du peuple suffisamment meurtri. Pour y arriver, nous demandons au Gouvernement de saisir officiellement le Conseil de Sécurité des Nations Unies pour solliciter une Résolution créant le Tribunal Pénal pour la RDC.
Fait à Kinshasa, le 10 décembre 2022.
Je vous remercie.
Justin BAHIRWE
Coordonnateur / SOS IJM